“Star Trek Into Darkness” : le compte-rendu de la masterclass de J.J. Abrams !
Lors de son passage à Paris, pour la promotion et l’avant-première de “Star Trek Into Darkness”, J.J. Abrams s’est prêté au jeu de la masterclass à l’issue de cette projection exceptionnelle. Compte-rendu.
Vendredi 26 avril 2013, dans la galaxie pas si lointaine du Pathé Quai d’Ivry. Il est 22h lorsque la projection en avant-première de Star Trek Into Darkness s’achève et que J.J. Abrams pénètre dans la salle. Aussi bavard qu’enthousiaste, le “maître”, comme il est présenté, se prête alors à l’exercice d’une masterclass exclusivement centrée sur son dernier long métrage, non sans remercier, à plusieurs reprises, les spectateurs d’être venus. Morceaux choisis.
L’univers de “Star Trek”
Comme il ne cesse de le répéter depuis qu’il a fait le premier, J.J. Abrams n’est pas un trekkie, un fan acharné de l’univers crée par Gene Roddenberry, contrairement à ses scénaristes. Le genre de “détail” qui pourrait poser problème… sauf que non : “Au contraire, c’est une bonne approche de ne pas trop en savoir”, explique le réalisateur. “Ça permet de tout remettre en question, non sans glisser quelques indices à destination des fans.”
Des fans qu’il respecte tout autant que l’oeuvre originale : “L’idée, c’est de raconter une histoire qui honore ce qui a été fait avant”, raconte Abrams, en se référant notamment à l’aspect pluri-ethnique de la série, que l’on retrouve sur grand écran. Un aspect qu’il a mis en place avec un mot d’ordre : “Reprendre l’esprit original, mais sans copier.” De ce fait, il voit davantage sa saga comme une version parallèle de celle avec Leonard Nimoy, d’où son caméo dans le Star Trek de 2009.
La J.J.’s touch
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“Tout est possible avec une caméra. Il faut juste savoir ne pas trop en faire.” Alors que d’autres semblent avoir découvert les différentes fonctions de l’appareil au moment du tournage, la mise en scène de J.J. Abrams n’est dictée que par son intention narrative : “Chque plan ou mouvement est là pour donner une information sur un personnage, ou susciter une émotion (…) C’est l’ambiance de la scène qui va déterminer son émotion, et donc la façon de la filmer.” Le réalisateur ne se refuse ainsi pas le mouvement lorsque l’action pointe le bout de son nez, pour mieux s’autoriser à se poser lors de moments plus calmes.
L’action, justement, qui est aussi une question de contexte, et le fruit d’un gros travail en amont : “J’écoute les idées des acteurs pour voir ce qu’ils apportent, et ainsi bien visualiser la clé émotionnelle de la scène.” Et si le schéma central du récit, qui voit le Bien et le Mal s’affronter, lui offre “beaucoup d’espace pour faire plein de choses”, J.J. Abrams n’en oublie pas l’authenticité pour autant.
Une marque de fabrique qu’il imprime sur chacun de ses oeuvres et qu’il a tenu à respecter ici, que ce soit pour la scène de chute de l’Enterprise (photo ci-dessus), obtenue par une simple bascule de la caméra et le concours des comédiens qui faisaient semblant (“Ça semblait ridicule sur le plateau mais au final le rendu est plutôt bon”), ou la poursuite finale : “Les fonds verts se voient, même si l’acteur est bon, donc c’est mieux quand vous avez le décor.”
Et puisqu’on parle de morceau de bravoure et de décor authentique, l’ouverture de Star Trek Into Darkness se pose là (photo ci-dessus). Cherchant quelque chose qui n’avait pas été vu dans la science-fiction récemment, J.J. Abrams nous offre une poursuite dans une jungle rouge entièrement construite en dur ou presque : “En fait les acteurs tournent en rond sur le même morceau, comme dans un cartoon”, explique le réalisateur en riant, avant de s’étendre sur ses intentions narratives. L’idée était en effet “de débuter comme dans un James Bond, en plongeant directement dans l’action sans qu’on nous présente les personnages puisque ça a été fait dans le premier opus (…) Le but est ici d’exposer la dynamique entre les personnages, comme dans un serial du samedi soir.”
Un IMAX de plaisir en 3D ?
L’idée de serial n’apparaît bien sûr que dans les intentions, et pas sur le format de l’image. Car Star Trek Into Darkness est le premier film de J.J. Abrams en 3D, alors que ce dernier n’est pas vraiment le plus grand fan de la technologie : “C’est censé être plus cool, mais ça ne l’est pas en fait.” De là à dire que le studio la lui aurait imposé, il n’y a qu’un pas… que le réalisateur nous empêche de franchir, en expliquant que la Paramount, pour le convaincre, a converti quelques scènes du premier. “J’ai alors pensé que c’était l’occasion”, explique Abrams, qui n’a pas eu à revoir sa mise en scène pour autant : “Je l’ai abordé comme un film en 2D, qui serait ensuite converti.”
Là où les choses ont été plus compliquées, en revanche, c’est avec le format IMAX : “Les caméras sont lourdes, elles se cassent facilement… C’est vraiment un cauchemar que de tourner dans ce format”, raconte J.J. Abrams, qui s’empresse néanmoins d’ajouter que “ça rend quand même très bien et c’est vraiment immersif.” Combinée à la 3D, la technologie confère même aux longs métrages un côté “grand huit (…) et c’est une bonne approche pour un film à effets spéciaux comme celui-ci.”
Meilleur sera le méchant…
… meilleur sera le film dit l’adage. Et celui-ci se vérifie à nouveau grâce au mystérieux John Harrison. Un personnage ambigu et qui échappe aux stéréotypes en vigueur dans le cinéma hollywoodien : “Le but était d’avoir un méchant surprenant qui vous fasse vous demander si l’on peut lui faire confiance”, explique J.J. Abrams. Ni blanc, ni vraiment noir, Harrison bénéficie d’une prestation nuancée de la part de Benedict Cumberbatch, sur lequel Abrams ne tarit pas d’éloges : “Je vous conseille tous de bosser avec lui si vous en avez l’occasion”, annonce-t-il au public.
Non content de savoir reproduire son timbre de voix à la perfection, le metteur en scène revient alors sur les conditions un peu rock’n’roll de l’audition du Sherlock de la BBC : “On lui a envoyé le scénario, et on l’a testé via iPhone. D’ailleurs il rendait tellement bien qu’on s’est dit qu’on allait abandonner l’IMAX et tourner le film sur iPhone.” Dans un sens, l’acteur n’avait visiblement pas besoin de ce format pour être impressionnant : “Il a une telle autorité naturelle et il était tellement impliqué dans son personnage qu’il faisait presque peur aux gens lorsqu’il arrivait sur le plateau.”
Abrams n’a pas précisé s’il faisait partie de ceux-là, mais il a sans nulle doute été son premier spectateur sur le tournage, en se tenant au plus près des comédiens : “Je reste parfois derrière le moniteur, mais je trouve ça bizarre. Tout dépend de la scène en question, mais je préfère largement être derrière la caméra, pour voir les acteurs dans les yeux.”
Et la suite ?
Après avoir conclu en évoquant l’importance que rêvetent ses scénaristes (“Je les considère davantage comme des amis avec qui l’on règle des problèmes”), J.J. Abrams a gentiment botté en touche lorsque la question d’un épisode trois a été abordée : “On verra s’il y a une demande. Mais nous n’avons jamais prévu le premier opus comme le début d’une trilogie.”
Il faut dire qu’avant de penser à ça, J.J. Abrams va s’attaquer à du très lourd : Star Wars – Episode VII. Un film dont il est “trop tôt pour parler”, mais le réalisateur se dit entouré d’une “super équipe créative” et décrit ce début d’expérience comme “surréaliste”. Il va donc falloir attendre pour en savoir plus, même si son goût affirmé pour les personnages de ses films et sa valorisation de l’humain au détriment des images de synthèse (“Tant qu’on peut avoir un acteur ce sera forcément mieux”) ont, mine de rien, laissé transparaître quelques indications sur ses intentions.
Propos recueillis par Maximilien Pierrette le 26 avril 2013
Crédits photos : © Paramount Pictures France